lundi 20 novembre 2006

Entretien avec Yann & Berthet

Poison Ivy tome 1 - Berthet & Yann - © 2006 Yann/Berthet/Dargaud


Est-il encore besoin de présenter le duo Yann/Berthet ? Leur série Pin-Up, qui compte déjà neuf volets (Dargaud), est connue de tous les amateurs de Bande Dessinée.
Ces deux auteurs se sont permis une petite incartade en travaillant sur les deux tomes de Yoni parus chez Dupuis. Ce diptyque s’éloigne de l’univers de leur collaboration précédente puisqu’il nous invite dans un récit d’anticipation dont certains codes ont été empruntés aux récits de super-héros. Ces codes se retrouvent aussi dans leur nouveau projet baptisé : Poison Ivy (Dargaud). Cette série nous replonge dans l’univers familier de Pin-Up, celui de l’Amérique à l’aube de la seconde Guerre Mondiale, mais avec un ton radicalement différent. L’humour et la dérision y sont omniprésents pour le plus grand plaisir des amateurs du genre !
Dans l’entretien qui suit, Yann et Berthet reviennent sur l’élaboration de cette série qui trouve ses origines dans un hommage qu’ils avaient rendu à un personnage emblématique de la bande dessinée américaine : Captain America !
Deux cases tirées de l'anthologie Captain America: Rouge, Blanc & Bleu © Marvel France

Nicolas : Comment avez-vous été abordé pour travailler sur ce récit de Captain America ?

Berthet : De manière assez simple en fait. J’ai reçu un coup de téléphone d’un des éditeurs de Marvel. Il avait eu l’occasion de lire Pin-Up en anglais et il nous proposait d’écrire une histoire dans ce contexte-là. On connaissait mal le personnage mais l’idée d’avoir quelques planches éditées par Marvel nous semblait amusante. On a traité ce récit de manière plus humoristique que dans Pin-Up. En réalisant ces pages, nous nous sommes rendus compte que nous nous plaisions dans ce genre de registre. Cette expérience influencera les choix que nous ferons par la suite.

N : Vous conserverez le concept de « super-héroïne » pour les séries Yoni et Poison Ivy. Vous connaissiez bien cet univers ?

Berthet : Le concept nous plaisait beaucoup. Je lisais des aventures de super-héros quand j’avais 15-16 ans. Mais je ne les suivais plus vraiment depuis.

Yann : Nous avons conservé cet aspect mais notre approche reste différente. Dans Poison Ivy, nous sommes loin de la logique des super-pouvoirs. Nous démarrons une aventure classique où tout est expliqué. On conserve un univers franco-belge, sans cape ni collants.
Un des deux libris du tirage spécial de Yoni tome 1 réalisé par Multi BD & Boulevard des Bulles
© Dupuis/Yann/Berthet

N : Sur ces planches de Captain America, vous avez aussi travaillé avec un autre rythme, plus rapide. Cet aspect semble vous avoir attiré.

Berthet : Oui, ce type de dessin permet une plus grande rapidité. J’ai à nouveau perdu ce rythme sur Yoni car il y avait bien plus de décor que sur Captain America.

Yann : Yoni tenait de l’envie de tenter une nouvelle expérience après Captain America. Mais le dessin plus réaliste de Yoni ne correspondait pas au type d’humour que nous avions envie d’utiliser.

Berthet : Avec Poison Ivy, nous reprenions le personnage qui apparaissait dans des strips humoristiques placés dans les albums Pin-Up. Si on donnait à ce personnage sa propre série, il me semblait évident que nous travaillerions avec un style graphique moins réaliste. Celui-ci correspond mieux aux gags de Yann et à ceux que je rajoute.

N : L’univers de Poison Ivy a-t-il été compliqué à mettre en place ?

Yann : Non. C’est une période sur laquelle nous avons déjà beaucoup travaillé. Nous conservons nos références principales, celles de l’Amérique et de la seconde guerre mondiale.

N : Le personnage de Poison Ivy est par contre fort différent quand nous le découvrons dans sa propre série. Dans Pin-Up, elle est une véritable icône glamour, mais ici elle apparaît comme une jeune sauvageonne qui n’a pas encore son physique d’adulte. Etait-ce un traitement volontaire ?

Berthet : Nous voulions prendre ce personnage à ses débuts et montrer comment il a évolué, comment il a obtenu ses pouvoirs. Mais ce personnage nous échappe aussi un peu car nous ignorons s’il va devenir aussi « vamp » que dans Pin-Up. Les lecteurs attendent du glamour, une femme plus sexy mais nous avons envie de lui donner sa propre vie ; une vie qui doit donc nous échapper en partie. Son physique change déjà au cours du premier album puisqu’elle se féminise dans la séquence du désenvoûtement. Nous ne voulions pas écrire les aventures d’une héroïne en culottes courtes mais je veux néanmoins la garder encore un peu ado (comme sur la quatrième de couverture). Elle changera peut-être après.
Poison Ivy sur la quatrième de couverture - © 2006 Dargaud/Yann/Berthet

N : Comment est venue l’idée de créer ce spin-off de Pin-Up ?

Berthet : Nous ne voulions pas vraiment lier les deux séries. C’est avant tout un clin d’œil plus qu’une série parallèle. Nous aimerions que cette série soit abordée comme une nouvelle série. On aimerait qu’elle s’écarte le plus possible de Pin-Up.

Yann : Il existe d’ailleurs une confusion. Certains lecteurs pensent qu’il s’agit de la jeunesse de Dottie (ndlr : un personnage qui sert de modèle au dessinateur des gags de Poison Ivy dans la série Pin-Up). Mais ce n’est pas le cas. Poison Ivy doit avoir son autonomie.
Poison Ivy dans un strip de la série Pin-Up - © Dargaud/Yann/Berthet

N : Comment envisagez-vous cette série dans le temps ?

Berthet : Le premier récit se déroule sur deux albums car nous avions besoin d’un album pour la mise en place. Le second tome concernera la première mission à proprement parler. Nous envisageons une deuxième mission qui sera en un tome.

Yann : On n’envisage pas. Je travaille déjà dessus !

« Les Exploits de Poison Ivy » tome 1 (Fleur de Bayou), Yann & Berthet, éditions Dargaud. Prix éditeur: 9.80 eur - notre prix: 7.90 eur.

(Entretien réalisé en octobre 2006 par Nicolas Verstappen pour le White Night Magazine. Un grand merci à Yann, Berthet et aux éditions Dargaud. © 2006 N Verstappen/WNM).



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