Le Marsupilami par Franquin
C’est le 31 janvier 1952 que le Marsupilami voit le jour dans « Spirou et les héritiers ». Pour bénéficier de l'héritage de leur grand-oncle, les cousins Fantasio et Zantafio doivent triompher de 3 épreuves. Or, Franquin improvise son scénario au fur et à mesure de la prépublication dans le journal de Spirou. Au moment d’arriver à la troisième épreuve, il tombe à court d’idée.
« Je cherchais désespérément une idée et je me suis souvenu d’une plaisanterie que nous faisions lorsque nous habitions chez Jijé. Quand nous venions à Bruxelles, nous prenions les trams vicinaux, et comme le trajet était très long, nous inventions les histoires les plus folles avec Will et Morris. Le conducteur du tram était un homme très actif et il devait délivrer les billets, ouvrir et fermer les portes… Nous lui avions imaginé une longue queue de rat pour l’assister dans ses multiples tâches… Et cette queue a dû m’influencer pour créer le personnage du Marsupilami. » («Cahier de la BD» n.47-48, 1980)
La troisième épreuve consistera à retrouver et ramener un animal semi-mythique vivant au fond de la forêt vierge de Palombie (Pays fictif situé quelque part en Amérique du Sud) : Le Marsupilami.
Une fois doté de son organe principal, il fallait trouver un nom à l’animal. Ce sera MARSU pour « marsupial » (bien qu’il n’en soit pas un !?), PIL en référence à Pilou-Pilou, le compagnon mi-chien mi-rien de Popeye (par E.C. Segar) et AMI car l’animal est doté d’un caractère très amical.
A l’instar des Schtroumpfs de Peyo, le Marsupilami rencontre un succès immédiat et Franquin lui consacre directement un deuxième récit, « Les voleurs du Marsupilami » à la fin duquel Spirou et Fantasio le confient au Comte de Champignac. Deux aventures plus loin, l’espiègle animal est à nouveau le déclencheur d’une nouvelle épopée. Les deux amis décident de lui rendre sa liberté et de le ramener en Palombie. Mais le Marsupilami décide de son propre chef de revenir avec les deux héros. C’est donc en « marsupilami libre » que l’animal participera dorénavant aux péripéties de Spirou et Fantasio.
Lorsqu’en 1968, Franquin décide d’arrêter la série Spirou et Fantasio, il cède à Dupuis tous les personnages qu’il a créé dans cet univers (Le Comte, Zorglub, Seccotine, etc.) à l’exception du Marsupilami. Ce dernier apparaîtra cependant encore dans le premier album de Spirou et Fantasio par Fournier, mais… dessiné par Franquin.
Le projet de Franquin est de faire vivre au Marsupilami des aventures indépendantes, dans la forêt palombienne, en compagnie des Chahutas, une tribu d’indiens. Finalement, il ne développera pas lui-même ce projet, si ce n’est dans une histoire courte parue dans le Trombone Illustré.
Franquin finit par céder les droits du Marsupilami en 1986 à Jean-François Moyersoen qui crée la maison d’édition Marsu Productions dans le seul but d’éditer les aventures des Marsupilamis en personnages principaux. Pour l’occasion, Franquin et Greg écrivent un scénario pour un jeune dessinateur, Batem qui sera formé par Franquin. A partir du troisième album, Franquin prendra du recul par rapport à la série, estimant que Batem est assez mûr pour assurer seul le graphisme.
Et puis, en mars 2013, les éditions Dupuis rachètent Marsu Production et le Marsupilami rentre à la maison après plus de quatre décennies. Yoann et Vehlmann, les auteurs d’alors de la série Spirou et Fantasio consacrent aussitôt un album, « La colère du Marsupilami », au retour du petit animal aux côtés du tandem et livrent une explication à sa longue absence.
Classification de l’animal
« Le nid des marsupilamis » est une sorte de parenthèse poétique dans les aventures de Spirou et Fantasio. Ni combat, ni course-poursuite mais une douce rencontre suivie des premiers émois amoureux et de l’arrivée des premiers bébés. Hasard ou coïncidence ? Le 19 février 1957, soit deux semaines avant la naissances des bébés marsupilamis, Franquin devient papa…
Cet « album-reportage » nous apporte, par la voix de Seccotine, quelques éclaircissements sur ce drôle d’animal.
On savait déjà que le Marsu est très friand de puces et de noisettes (importées ou locales). « Lors de leurs premières observations du Marsupilami en liberté, Spirou et Fantasio ont cru qu'il se nourrissait exclusivement de puces. En réalité, les puces ne sont pour lui qu'une friandise. Ce dont il se nourrissait le plus, dans la forêt vierge de Palombie, c'est de petites noisettes que les habitants du pays appellent pinones et qui poussent sur des sortes d'arbres à caoutchouc.
Au début de son acclimatation en Europe, le Marsupilami continuait à se nourrir exclusivement de ces noix, ce qui était très onéreux : on n'en trouve pas chez nous, Il fallait en faire venir à grands frais d'Amérique centrale.
Par la suite, on s'est aperçu que le Marsupilami mangeait tout aussi bien les noisettes de Spip. Et diverses expériences l'ont prouvé, le marsupilami est maintenant omnivore : il mange de tout. Notamment le papier à lettres de Fantasio… » (Texte paru dans Spirou 935 du 15/03/1956 - signé Spirou et Fantasio)
Le Marsupilami est l'énigme scientifique du XXe siècle mais -aujourd‘hui encore- elle n’est toujours pas complètement résolue. Mammifère doté d'un nombril, il pond des oeufs. Il se déplace aussi facilement au sol que d'arbre en arbre ! Sans oublier son aptitude amphibie. Force et résistance s'allient à une mobilité hors pair.
Le pelage du Marsupilami n’est pas sans rappeler celui des grands félins, jaguar, léopard ou guépard. Tout comme chez le léopard, il peut naître au sein d’une nichée de marsupilamis un individu atteint de mélanisme. Son pelage est alors tout noir. (N.B. : Un léopard noir est communément appelé « panthère »).
Mais ce qui caractérise le plus le Marsupilami et le rend reconnaissable de loin, c’est sans nul doute sa queue de 6 mètres de long ! Suspendue à sa queue, le mâle emporte sa famille d'arbre en arbre. Pour nager rapidement, il l'utilise comme une palme. Transformée en ressort, elle le propulse à plus de 30 mètres de hauteur. La queue du Marsupilami exprime son caractère. Elle le dispense de devoir s'exprimer avec des mots. Grâce à elle, il sera toujours visuellement surprenant.
La queue de la Marsupilamie est moins longue, mais portée avec beaucoup plus d'élégance que chez le mâle. Elle marche sur la pointe des pieds, à tous petits pas. Tout est grâce chez elle. Phénomène, plus remarquable encore, la Marsupilamie est, à notre connaissance, le seul animal qui ait des notions de toilette décorative (fleurs entre les oreilles...). Pour vérifier la bonne tenue de ses arrangements, elle aime rêver au bord du rio qui, à sa façon, lui sert de miroir. Si le Marsupilami fait rarement entendre sa voix… La Marsupilamie, elle, a un chant… ou plutôt c’est un babil, abondant et gentil qui veut dire qu’elle est contente…
En cas d'attaque du nid, la partie supérieure peut descendre. L'ensemble devient alors totalement hermétique. Le même principe entre en vigueur en cas de vacarme intempestif. Les parois intérieures et les plumes font alors office d'insonorisant ! Ayons une pensée émue pour le Ara, ce grand perroquet à longue queue, fournisseur attitré (involontaire) en plumes colorées de la famille Marsupilami.
Croquer un fruit sauvage (il est gourmand), prendre sa douche sous une cascade (il aime la propreté) et admirer le vol gracieux des colibris (il aime les jolies choses) sont les petits plaisirs de sa vie. Le Marsupilami est doué pour le bonheur.»
« Spirou et les héritiers» Spirou et Fantasio #4, Franquin, Dupuis, 01/1952
« Le nid des marsupilamis » Spirou et Fantasio #12, Franquin, Dupuis, 01/1960
« L'encyclopédie du Marsupilami de Franquin» Marsupilami HS, Batem, Verhoest et Cambier, Marsu Productions, 11/1991